Poesies, 2018

CENT BATTEMENTS ET AUTRES CYMBALES (2018)



↪ DU BLEU DES ENDORPHINES
↪ RELIEFS DE FAUTRIER
↪ CINQUANTE NUANCES DE NOIR



DU BLEU DES ENDORPHINES

2 janvier 2018

l’amour ce n’est donc pas toi et moi

mais une immanence qui fait de nous

une commune rébellion

                                         ***

3 janvier 2018

l’harmonie qui cassait ses verres vides

les châteaux et les vents dans l’écume

la romanité dans la pierre

le cœur dans sa scordatura

                                         ***

6 janvier 2018

je l’aimais un pas plus loin

mon cœur dans ses racines

de ce monde d’abysses que tu respires

                                         ***

7 janvier 2018

comme une femme aux vendanges de raisins verts

c’est un matin qui se lève

la volcanité de tes lèvres

le bleu des collines d’Anacapri

                                         ***

8 janvier 2018

et tout au long d’un fleuve de nuit j’ouïssais

mes démones longues et languissantes

dans un bruit de fer et d’anamorphose

les murmures de moissonneuses

à ordonner l’enfer

                                         ***

je colonisais nos amours en pompon de soldat

le drapé d’un temps dédoré

sur les quais et le monde qui vient au vent

de tous ces alizés et ces asphodèles

ces voyages et ces lumières du jour

de tous ce qui bariole et vient d’elle

et des murs de Guanajuato tout autour

                                         ***

mon ami French

de l’Irlande dans l’écume et les récifs

                                         ***

j’ai laissé passer les rêves dans la ténèbre

où elle avait pris ma main

                                         ***

9 janvier 2018

battre dans la poitrine d’une battue

de soulier de satin

le cœur y a le soleil des dormants

les jours perdus

les antres et l’ankylose des étoiles

                                         ***

12 janvier 2018

ce sont des roues d’or qui sortent de la nuit

mille aiguillons de soleils sans naissance

des perles sur la poitrine

avec des baisers de passe-pied

les chants qui viseraient le cœur

du rêve vivra des sommeils

les récifs et leurs bardes ont la nostalgie

de la bombarde

l’amour verdissant dans l’obsolescence

le rêve reverdi que les étoiles tombent

                                         ***

« l’amour m’emporte que je suis prêt pour Anacapri » disait le flûtiau

                                         ***

les suicidés n’ont pas gagné

les non nés non plus

                                         ***

14 janvier 2018

est-ce le chant d’Icare qui a trahi ses ailes ?

est-ce le chant d’Ulysse qui tissait

les tapisseries de la patience ?

la pierre séculaire laissa-t-elle crouler

le monde à visage d’homme ?

nous avons toujours comme Montaigne

précédé le vent

charrié le cheminement du doute

rendu la vérité à ses racines

                                         ***

18 janvier 2018

peut-être le ciel était-il un bal

une humeur masquée

où tout ce que je croyais mort

menait d’une verdeur de racines

dans l’exil des saisons

une mer prise par les cheveux

peut-être que les landes vertes

du désir

s’insurgent-elles d’un sillon neuf

qui tombe sur la ville

peut-être que le labour pointe au ciel

les étoiles immarcescibles

                                         ***

la pierre était angulaire la mort venait

d’un lointain exil

je venais en toi dans un A 380

crevant le ciel qui ne répond plus

                                         ***

c’était un arbre c’était une nuit

c’était la pierre et le silence

l’obstétrique d’une volonté obscure

                                         ***

comment ne pas épuiser les nuages porteurs de tous nos possibles ?

                                         ***

21 janvier 2018

d’avoir tant aimé ces blés de tes étés de cerf-volant

ma fille sur ces plaines d’Autriche

ce bleu dans les bras qui s’ouvrent

les diluviennes métamorphoses au sextant des étoiles

que nous en gardions le cœur au secret

dans les cales de galériens l’horizon s’empourprant

la mort se dissipait dans des paraphes de vent

comme une sœur dans l’enclos la clé perdue

sous les baisers des chevelures

                                         ***

comme toute cette mort dédorée toute voile hissée

à la brûlure d’un parvis d’église millénaire

tenant la main d’une communiante nocturne

sauvageresse du clocher à boire les plainchants

murmurés

il nous venait des écailles de vitrail

                                         ***

22 janvier 2018

ce que nous gardions de survivance à la mort

ces éclats des prairies

et les parterres de roses nocturnes

les sibyllins crépuscules dans les engouffres

que j’avais du fond des poches pour tout secret

les pluies fertiles et les femmes d’oasis

ce que pourrait être un chant d’Esope

grisâtres amours à nous pendre et hanter

le long de vieux boulevards

                                         ***

je viendrais le long des quais à passer les ciels

d’une autre colline

je ne viendrais qu’enténébrer les étoiles pour te vivre

sur les ruisselants poissons d’or de notre faim

                                         ***

nous nous étions aimés dans un miroir qui a brisé

la nuque d’orfèvre et l’illusion

de tes ombres désertiques

ce manque mortel de mes suppliques

                                         ***

pour le bas ventre se masser le désir

et puis plus haut

pour le monde de la faim

                                         ***

j’ouvrais la chambre sur ses infinis

les plèvres sur la lumière

les branchies sur les nocturnes

                                         ***

pour de bas scorpions y aurait-il cette infidélité du ciel

qu’il ne plante son dard de St Georges

dans ce cœur même impliquant notre nuit ?

                                         ***

j’avance dans la nuit les herbes hautes

au déhanché de tes désirs

                                         ***

nous archivions les morts comme on enregistre

les lumières qui constellent

                                         ***

le mur la nuit la pluie l’insoluble

ce qui vient du plus loin de l’étoile

                                         ***

la nuit ce sont mes yeux qui se ferment

ce n’est pas la fête ce n’est plus le rivage

les herbes naissent et croissent au vent

comme une angoisse

de blés et de soleils les joues qui brûlent

le sang qui frappe et frappe

à fermer les yeux dans des entrelacs de verres

pour que la nuit vienne

                                         ***

j’ai insensément postulé à l’éternité en attendant

que les spectres de la lumière

les aurores australes et boréales 

les soleils dénoués

et les ampoules qui cassent ne prennent congé

                                         ***

23 janvier 2018

Borgès invente des rois mages et des personnages de sable

des chimères et des Bérénice qui déchirent le ciel

et des milliers de feuillets au vent

dans les quartiers décatis de la vieille Buenos-Aires

                                         ***

25 janvier 2018

nous avions le même pouvoir de nous élever

que de prendre la mer dans notre infini vivant

dans la terre reptile ou la fonte des soleils

nous avions le pouvoir de nous élever

de cette main qui est la tienne dans la mienne

le vent est tombé sur les herbes crépusculaires

et sa peau de frisson

comme une femme de l’ombre dans les astres qui durent

                                         ***

demain ce seront les vérités de Spinoza

les larmes et la couleur battant

les cœurs en crues

les navires qui viennent loin rivés aux étoiles

les amarres constellant dans les vents de poussière

et de poumon

ce seront les vérités décillées

à faire de la mer l’airain et la décollation de notre solitude

                                         ***

27 janvier 2018

serais-tu -pour m’aimer- dans cet inusable désert

ce qui se perd de trésor enfoui

ce boisseau d’une âme qui libère le rappel des oiseaux ?

                                         ***

j’avais caché un trésor de pirate dans l’enfance de ma fille

sur des rives qui ne reviennent plus

tout un désespoir de secrets d’herbes hautes

et de flibusteries

le cœur d’un dimanche sur la main d’une petite madone

                                         ***

31 janvier 2018

l’aurons nous voulu la vie qui nous a fait vivre

les vingt ans

ces années et celles qui ont suivi

les nuages ont passé vertébrant toujours vers l’Ouest

dans des trains de nuit le travail du métal

et le nom des gares soufflant vers les étoiles

l’aurais-je voulu la vie et les sables rencontrés

avec toi en ces années

les nuages à la verticale et les vertiges d’existence

où nous partirons nus

l’aurons nous voulu cette volonté de la lumière

la fenêtre des veilleurs

l’homme habitable de foudre

qui descend dans le poids des jours

de nos étoiles

de nos rêves de géant

et des nouvelles ombres à venir ?

                                         ***

2 février 2018

de la main de fer des morts de celles qui commandent

il ne reste que l’épée agenouillée

l’enclos des furies taurines les profonds sud

où sont les humains fiers à hauteur d’horizon

l’herbe vive la verdeur des enfers

dans le baiser clos d’une femme

                                         ***

comme le ciel blanc d’une nuit blanche à fermer les yeux

l’ensorcellement venait plus profond qu’à l’aurore

de nos griffures d’abîmes

                                         ***

ceux qui voient la nuit ceux de cet argenté des étoiles

des verres à boire et des mousses de bière

les paroles données par le vent vivant de sables froids

comme baiser au partage entre chien et loup

                                         ***

ma vie moindre

de routes moites

avec des ciels ladres

des pavés de devoirs

des revolvers d’asphyxie

des beffrois près des cieux et

des sonneries d’étoiles qui affament

                                         ***

3 février 2018

ma vie s’attardait dans de nus labyrinthes

                                         ***

5 février 2018

nous imaginons nous sans espoir sans dieu sans cravate ?

que le cœur se cache derrière de seules lunettes noires ?

que le diable peut-être jugé ?

                                         ***

6 février 2018

toutes mes amours ayant rejoint leur étoile

j’entendais le coquillage fendre le bleu de la mer

rempaillé sur ma solitude et debout

le cœur vacant sans plus aucune pesanteur sur nos foudres

                                         ***

nous avions mis en lumière le tohu-bohu des astres

dans la chair même tout au long de la lyre

l’encolure du désir

                                         ***

Rome que j’aimerai toujours dans sa pierre

et ses Respighi ses fontaines ses plèvres de pauvreté

ses orages de pieds nus de septembre

Rome de blancheur et d’ocre d’antique

de collines bleues           où vivre s’échancre

sous l’érection des colonnes et sous la louve

ville de pavés appiens d’églises

et de ruines qui nous font mourir

                                         ***

13 février 2018

ma fosse est encore vide il y a le marteau

du temps qui frappe aux tempes

et les acouphènes comme seules violes de gambe

mer intérieure dans un cœur large que le vent opère

                                         ***

14 février 2018

femme d’abondance au lait de couleuvre

homme de glaise et tous deux

dans le nu des vignes originelles

les genoux aux escarres

la tétine au ciel

                                         ***

15 février 2018

c’est une vie sans écriture un haillon de routes

de plèvres bleues à la lueur de la nuit

une respiration d’encre qui décline

c’est là où je vécus dans les fermentations

de l’attente solitaire

dans l’azur vertical qui m’éloignait de Dieu

et qui posait ses pas dans les espérances

de la chair et ses sanglots

comme un prurit d’orgueil crépusculaire

sur des ruines de Ségeste

c’est là où de l’abîme des misères et

de l’étendue du vivant j’ai creusé

et j’ai affronté l’aube des vieux rasoirs

sur les rosées du monde où naquit la rose

                                         ***

la robe foulée aux pieds de quel crépuscule irriguait

la nuit qui brûle ?

                                         ***

16 février 2018

mon amour immatérielle tu es entre

sixième et septième vertèbre de douleur

                                         ***

DIAGNOSTIC  ARTAUD

Dans la douleur de sa chair, à manger ses propres dents dans leur gouffre, je me demande encore si Artaud ne sublime une schizophrénie addictive et une déraison programmée par l’épuisement de la drogue, comme qui voudrait s’abstraire du bastingage empesé de la vie qu’il n’a jamais semblé accrocher dans son meilleur parallèle, ou si le malade de Rodez a trouvé dans la noblesse et le classicisme de ses lettres la déjection geignarde et la sublimation d’une impuissance à vivre.

D’où l’œuvre d’art inséparable dans son esprit de la neuronale et abyssale expérience du ventre et le refus, dans la douleur de ses membres, de porter le monde.

                                         ***

22 février 2018

ce parfum de tigre et d’aurore jaunie l’habitable de la chevelure

dans la houle de la nuque

peut être une chanson qui trotte

 un sillage de désir

et des papillons en amont des collines

virginale

à la clarté du Verrocchio

je l’aimais depuis le balcon qui n’était pas celui de Vérone

mais du plus haut des astres 

d’un lac étoilé de fureurs de dentelles

                                         ***

26 février 2018

nuits blanchies nuits sans paupières

sans sommeil

nuits sans dents

nuits à l’usage du temps

nuits de vins lourds

nuits féroces de clameurs

nuits de silex et d’usuriers

nuits de givres et de lèvres pauvres

nuits sans matin

nuits des neiges bleues

nuits de crénelures et de tisons

de fantômes et de panthères

nuits de ce qui espère

nuits de sanglots glabres

nuit de l’étoile timonière

                                         ***

28 février 2018

O Syrie O millions d’amertume mille et mille intestins

de religion

le vent est vivant la nuit s’allonge

et le soleil d’Icare nous mesure

et comme avalanche de nausée

la sanctuarisation du temps sur le ventre des traversins

la nuit implose

                                         ***

je suis debout dans mon squelette

je n’ai peur que de la nuit

de cette pierre qui fige plus que la neige

1/5 Mars 2018

étais-je dans le cœur d’Iphigénie de celui d’Electre ou de Médée

de toutes celles qui redonnent l’espérance à mon visage de miroir

qui porte le vent vague après vague ? Irons-nous au-delà des ossuaires

et de leurs lames de fond dans le goût des baisers et de leurs cicatrices ?

étais-je dans ce cœur des vieux calvaires quand cette mort promise

crépuscule après crépuscule serait cette main de Commandeur

à la pointe de la dague ? dans le verbe absolu j’ouïssais le cri de la chair

l’ombrageux crissement de l’orgueil dans son torrent le goût du sang

promis dans sa face cachée- étais-je dans ce fond de l’oubli comme

un marbre qu’on décave à la lumière de tes mains tendues le vieux recel d’aujourd’hui ? Mais il fait si beau sur ces terres de déshérence

à la pointe des vestiges des orgueilleux fûts doriques qui virent

les chevelures et les chants contemplatifs des tragédiennes -j’espérais

l’angoisse plus tardive dans le ventre abyssale d’une malemort jaune

à couleur des jours naissants- étais-tu encore de ces pays d’oliviers

à m’attendre dans l’émeraude et la pierraille des coulées de Jabron

de Manosque à la main sur le sein de ses collines et à la dramaturgie

de ses sources ?- étais-je dans ces strates géologiques du cœur

et ses amertumes à vocation d’amnésie des Mélisande et de la vieille Ariane loin des fleurs de fontaines et fardées de pesanteur ? étais-je

dans l’enracinement des nuits mutilées le dernier maillon de la chair

le ventre possible de Bérénice à Titus la nuit devenue gorge la nuit

qui soupire de cette nuit qui dicte la voix grave des plus graves

de celles qui s’engorgent comme s’envinassent les bacchantes de la rue-

et c’est mon corps qui quitte mon corps jour après jour là où les houles

élèvent aux désespérances les marées basses les châteaux à la pointe

extrême de l’occident comme une nuit qui fêle s’établira au biseau

de nos baisers là où pour toi je n’aurai plus aucun versant

de la nuit bleue la nuit berceuse en ses dentelles de sommeil

la dessillation de la femme à blancheur du plain chant de minuits reptiles

je baiserai tes lèvres de toutes les charges de l’angoisse la matière

vertébrée qui me maintient debout à la racine et au parangon du temps

nous devenons à la fois sujet de nos ruines et éternels porteurs de nos pierres- à mourir de bris de cervelle et de nuits d’anthracite- les yeux

se ferment à Fausses Reposes les étangs et les Corot engrangent un blé

métamorphosé où sont les Calypsos ceux qui disent « mort me voilà »

le vent du voyageur la rumeur des ergastules depuis les chemins acérés

du milan qui couvrent l’espace aurifère et les abandons de la chair

les sentiers de la mer vers ce toujours plus proche jugement

d’une mort déclinant ma lignée de conscience auriculaire

                                         ***

5 Mars 2018

nous eussions aimé la grâce pour une aurore de désespoir

                                         ***                                                                                       

j’écrirais ton nom et le mien jusqu’à creuser aux plus profonds

replis mécaniques de mon cerveau

                                         ***

l’amour peut bien prendre la mer à défaut de frapper à ma porte

l’amour revient aux marées à chaque parfum d’algues

sur la nuque de tes désirs

                                         ***

les frisottis de l’élégie

l’amour à mal

                                         ***

comment venir la mort dans l’âme sur les chemins de la liberté ?

                                         ***

l’amour versifie jusqu’aux extrêmes départs pour un monde

au vent boiteux

                                         ***

lorsque le temps nous avait scellés il revenait

un parfum de l’enfance

sur les passerelles de la mémoire

une griserie du bitume

une odeur promise de ma finitude

                                         ***

une civilisation n’est conquise de l’extérieur que si elle est poreuse de l’intérieure

                                         ***

la peur est-elle dans ses porcheries d’angoisse

le limon d’une mer nous ayant enfantés ?

et quelles sont ces peurs plus graves

des battements de cœur de l’agonie ?

                                         ***

6 Mars 2018

je rends toutes les pyramides de la connaissance pour la galactique

chaleur des paroles susurrées dans la nuit qui fut la notre

dans la chair improbable de notre éternité

                                         ***

Je ne fus pas le seul à me méfier de la mort. De l’idée de la mort.

Parce que celle-ci ne tombera jamais dans le coffre-fort de nos possessions ou de notre maîtrise. C’est elle qui dépose fatalement et très justement.

Je me suis toujours méfié de cette espèce d’improbabilité, qui dans ce contrat à vie, nous exposait en fin d’histoire. Ce seul contrat, même au-delà de la signature d’une goutte seule de notre sang oblige à rendre un héritage non sollicité. Je me méfierai toujours de la mort parce qu’elle s’annonce parfois à l’essai.  On a l’impression nette qu’on peut la toucher par la seule sensation d’un lendemain de cuite, d’un amour qui s’en va comme un bras qu’on arrache. On pourrait s’habituer à cette espèce de seuil devant lequel il est heureux de revoir la réalité de l’état de veille après un mauvais rêve.  De revenir à sa propre gravitation. Je me suis toujours méfié de l’idée de ma mort. De même qu’elle a toujours exercé un ascendant sur la trajectoire de mes jours qui se dévident comme le sable dans le temps du sablier. La logique et la raison persécutent le jugement que je peux avoir sur la chair même de l’inéluctable pensée de moi-même dans sa finitude, corps et âme comme on dit. Notre conscience dans les forces vives de ses facultés ne présente-t-elle pas plus pure et plus élevée pensée que celle de la chute ? Les araignées qui se contorsionnent au moment où elles sentent ma main qui veut les anéantir ont-elles cette épée d’anéantissement chevillée à leur existence, hormis le moment de la menace, comme ce qui nous fait porter à chaque acte de conscience au plus profond de nos gènes, cette foudre permanente ? Je me suis toujours méfié de ces paupières qui se ferment

et de ces sommeils qui dans leur trou noir se prennent pour le versant

jumeau de la mort. Et si « la vie est un songe » présentait la seule vérité de l’illusion de la vie ainsi que la douloureuse certitude de la finitude de cette illusion, je me serais toujours méfié de l’approche de la mort, d’un rideau d’au-delà où, comme pourrait dire Lovecraft, poète de l’inachevé et de l’ineffable, … LA EST LE MUR

                                         ***

d’anciennes douleurs s’ouvrent au tourniquet de l’existence émondée

                                         ***

7 Mars 2018

mon cœur devient diaphane

à la manière des pleurotes roses

                                         ***

10 Mars 2018

comment en serait-il autrement dans la nuit de la misère ?

de tout le toutim des affres de l’hiver

de ces libertés et de ses ruses rancies

de ses prisonniers de cœurs en friche

et des couteaux croassant leur cran d’arrêt

comme des dents d’abside froide

de chapelle perdant leurs pierres

je n’étais à toi qu’une vie promise

dans l’airain solaire

la solitude susurrant « La Paz plutôt qu’Alcatraz »

                                         ***

vivre est autre chose qu’oublier -vivre est de prendre les soleils de nos jours

l’antre des dieux impossibles -frapper les carapaces du temps

les lianes qui enserrent -vivre est pour toi autre chose qu’oublier

parce qu’il y a la marelle des astres dans la géométrie de nos nuits

et que vivre sera demain l’enchevêtrement de nos membres de tétanie

                                         ***

les amphores ont-elles le miel des Alyscamps

les avenues Alphonse Daudet

le pain aux croûtes qui cassent

les morsures taurines des matins

d’Arles ?

écartant l’écorce

j’effeuille le soleil des platanes

                                         ***

mon amour de terre cuite au sourire totonaque

                                         ***

12 Mars 2018

mourir avant l’heure… celle de la planète qui tourne-

de la mer et de la colonne vertébrale là où sont toutes

les douleurs -l’ankylose des impatiences mes falaises

mes bondieuseries et les abscisses le long des rivages

ma solitude de sables pas à pas -l’amertume

de nos lèvres à la fin de nos principes -le cogital

de notre faim lorsque la nuit est porteuse d’étoiles –

leibniziennes mes mains dans des poches

qui les contiennent toutes

 -de te rêver et de t’exhumer sans détriment

à la lagune

des tortuosités névralgiques des appels du cœur…

me faire mourir pour préserver

« ce temps de la mort

ce cœur vivant comme une pulpe de visage

ma vie redevenue battante

sur l’écran d’un autre temps devenu fragile »

je me ferai mourir de tes bras de galaxies

d’un amour d’ivresse désertée dans les galets

de mes solitudes

                                         ***

13 Mars 2018

j’ai reçu le ciel -l’humilité du temps

                                         ***

l’éternité- quelle punition !

                                         ***

18 Mars 2018

je ne dirai pas « avec toi sur un petit banc près de l’église »

puisque Trenet a déjà tout dit

« et petit marquis de perruque »

puisque le vent emporte les amours et les dentelles

mais je caresserai ce seuil de tes lèvres du fond de soleils froids

je ne dirai pas « demain la flûte souffle depuis les terres promises

les ténébreux dimanches des guinguettes »

puisque les violoncelles du temps portent des routes bleues

qui ensemencent le fracas et le murmure de chacun de tes mots

                                         ***

les dictatures solaires sont sur les semailles

et nos saisons ont enfin ce goût que donnent

les fruits à naître

                                         ***

26 Mars 2018

j’aime une qui est dans les dentelles de Durance

fille de l’olivier

de la lavande

et du crépis d’Andalousie

dans tous les bistros du cœur nous sommes de territoires apaches

                                         ***

28 Mars 2018

mes plaies mes pierres d’exil

au large

biseautées

ces amours de fer

que soufflent les avarices du vent

                                         ***

j’ai ce désir des désordres

la poigne du soleil

qui fait se mouvoir

la nuit de tes résurgences

                                         ***

le monde avait retrouvé sa place

dans les circonvolutions

et les tutoiements

à fendre la mer

les gravités qui nous faisaient hommes

                                         ***

et quand tout sera fini aurons nous envisagé

ce qui manque aux mortels ?

                                         ***

ça fait déjà longtemps qu’il est trop tard…

                                         ***

31 Mars 2018

le mur nous séparait -puis la fenêtre sur la mer-

la mer entière depuis les balcons et les échelles

où nous étions -la nuit nous séparait

jusqu’au souffle du temps                                         

le temps nous avait séparé de la dernière étoile

de nues perdues

comme alpha et oméga depuis ma main dans la tienne

nous séparant des ténèbres

1 avril 2018

nous n’aurions donc plus que le goût de la poussière

du varech dans l’errance et le sablier asphyxiant des rivages

                                         ***

j’ai fui la nuit épousé la pierre

demandé l’orage pastoral

la voie Appia

le cobra du temps sur nos bouches

l’accession à la foudre

                                         ***

2 avril 2018

j’aime ces théâtres aux bottines de sang rouge

ces rideaux d’aventure

comme aux morsures de tes lèvres

tu me disais de nuit qui tu étais

                                         ***

3 avril 2018

d’avril et de pavots bleus le parfum du monde

sur ces anciens bancs déserts d’un parc ancien

l’arche odorante de ta peau de fougère sur les lèvres

l’oubliée nous menait au cœur

                                     de Schubert sublimes et tristes

dans la chair tiède de juin et de platanes patriarches

lorsque les nuits donnaient ces larmes primitives

de ceux vivant de la clarté de plein exil

                                         ***

4 avril 2018

BONBON POUR Y

dans ma rue ma gare est en grève

dans mon ciel ton nom est de miel

képi chef Y chef de gare

dans un rêve

 « Tchou tchou » pour ouvrir le ciel

                                                                            -fin du bonbon-

                                         ***

Wyoming ça commence comme un geiser de ciel

un orage dans les solitudes

sous la paupière des bisons

les arbres sont calcinés le monde est sans merci

ce n’est pas le Mexique ni le couteau qui tranche la gangrène

c’est l’orgueil de la lame

le soleil qui purifie

                                         ***

6 avril 2018

me trouer et m’enivrer de complaintes comme avec Rutebeuf

dans celles de Constantinople

ma force serait ma faiblesse et mes larmes pour les femmes

dans le gouffre de tout ce qui se perd

je reste dans les amours auriculaires à l’aune des ivresses

à espérer les montagnes qui ensevelissent ce temps des surdités

l’écho des cariatides à me dire « à combien de fièvre le décati de la pierre »

la bouche de douleur telle que la mienne

je ne sais où tu es de neige d’affres et de montagnes

et même encore de ces villes qui sont sous les pluies de pavés 

la porosité des pauvres au rythme des souffles

crime d’enfer de m’emporter le cœur

je saurais demain mourir sur les barges solaires au lointain des quais

des ports et des Valparaiso à me dédire de mes amours sur ces pavés

de fenêtres sur la mer les houles qui ensommeillent

et chiliennes ces rebuts de complaintes ces soleils qui s’inversent

quand je viens vers toi  dans le plus profond des sud

                                         ***

O les douces douleurs gésualdesques

les austères rudesses 

dans les noirceurs de la mer

la voile unique des solitudes

                                         ***

tu m’avais donné dans le plus profond de moi la nuit qui obtempère le doute d’une vie antérieure

la parabolique épigraphie antique inscrite dans la pierre hostile

mal armée pour la maçonnerie du temps

de te savoir vivante dans la plaie qui nous déconstruit

                                         ***

du fond de la vie des cellules il est un petit Ponge

qui voit trèfle éponge et bouche d’eau de fontaine

une fourmilière active cadenassée dans l’ordre

des pensées massives les amours structurelles

faisant déborder les grands bang des origines

                                         ***

de fin Mars toujours de Vaucluse les amours d’Avril

m’ont fait connaître ton nom

les diluviennes promesses de nous appartenir

                                         *** 

mon cœur aurait pu écrire « le dit de la sainte promesse »

la nuit en devenir dans la mathématique du désir

                                         ***

7/8 avril 2018

paroles de ma misère quand la poitrine se serre

misère du ciel au travers d’un temps qui condamne

                                         ***

Montrecourt trouée du Nord et des Hauts de France

de ces printemps d’herbes hautes

de givre aux rideaux vichy

de la main qui tremble

du pavé où manquent les bœufs du ciel vicinal

et des pierres qui prennent la poitrine

je suis au bistro du carrefour de l’arbre mort

comme un monument antique

mon cœur s’embarque vers les nuages bas

et la suie des cheminées

de tous les trésors de la solitude

                                         ***

10 avril 2018

je porte des nuages à bout de bras

je dépose des pleines pelletées de ciel

sur les imprimés de ta peau

j’augure le jour triplement aimé

d’une faim comme pleins jeux d’orgue

de ce vieil Ulysse auquel je viens à ressembler

je dépoisse les premières feuilles bruissantes

sous les pas de mon automne

comme augurent de la pleine clarté

les risques de l’âme sous les craquelures de mon cœur

                                         ***

Bruegel de Velours l’Ancien ou celui des vieux hiver

c’est un déchant où le jour est fragile

les rues et les jeux d’enfants que j’ai traversé

à la cloche de huit heures du matin

de ces cours d’école qui naissaient à la fin de la nuit

Bruegel le vieux l’ancien ou celui des velours et des réveils

c’est l’âme qui chante les premiers matins qui claquent

dans les voiles du temps

                                         ***

mourir en regardant passer les collines

chaque jours différentes

le cœur en amande

les mamelons les seins aimés sous le soleil

                                         ***

11 avril 2018

j’étais derrière les fenêtres bleuies de lune où tu n’étais pas

j’avais perdu mes livres et la mémoire première

le temps des beffrois sur les touches que cognent de leurs poings

des chants de ciel dans des azurs de clavier

                                         ***

la nuit m’est encore une province aimante

un murmure à voix basse qui parle de destinées froides

sur des écrans éblouissants de désirs

                                         ***

12 avril 2018

ma fille, notre naissance est venue de l’ombre d’un marigot

lointain -de chair dans la chair- de caïmans de nacre

de millions d’épées assaillantes de fureurs et de désirs

de cirques de joies de putritudes d’amours et de sperme

de viols d’héroïsme de chevaux et de ceux

qui ont eu à chevaucher

notre naissance de berceau est venue de si loin

de spasme et de ferraille de pierre en pierraille

de soleils immobiles et de la patience du fonds des mers

des fonds décavés des plus profondes morts

des éclats brutaux de la fin des étoiles de soleils déclinants

de naissances comme des claquemures

de naissances de petit homme dans les lunes et les myriades

de violences stellaires

des louveries de femmes à la soumission du monde

de ces cataractes aveugles d’où viennent le monde et l’immonde

comme au jeu d’osselet jusqu’au ventre de l’amour

des tunnels de voies nocturnes du plomb des dieux

de galets et de plages des oiseaux rares

du gouffre de l’angoisse des prières et de la fin des attentes

jusqu’à ce jour de l’attente de ta naissance

                                         ***

tu étais la névralgie du monde le solstice du temps équinoxial

de ce sud qui guerroyait contre ces pluies posant des baisers

sur la fonte de tes illusions

                                         ***

nous vivions d’argile et d’amertume

de ces crépis du temps

de l’oubli de nos ventres

de l’infidélité des dimanches

des pluies et des neiges

des trous d’air de tes baisers

de la diphonie de nos amours

sur des falaises crues

à la naissance des crépuscules

                                         ***

revoyant le ciel des obscures douleurs

-mère du cœur des atomes- disait-on vers 1970

                                         ***

17 avril 2018

Palerme il y avait tes matins échevelés les cris de Janequin

sur la place de tes marchés tes ferronneries

les ventres et les guipures avant que mort nous fonde

Palerme de tes pavés de ciel comme autant de mosaïques

à prendre les citrons les oliviers et les pierres anciennes

qui embrassent le corpus de mes racines

et ce qui d’avant mort nous refonde

Palerme dans les lits de tes vieux crans d’arrêt

d’azur et d’éternité

j’arrivais de nuit au petit matin de tes caresses

avec les accordéons de tes férocités

                                       ***

19 avril 2018

dans le palais Gansi verrons nous les lambris du guépard-

les rustines sur le temps des orgueils ?

                                         ***

« Oublier Palerme » disait-elle…

comment pendre la nuit

sur les mosaïques de notre mémoire ?

                                         ***

prendre ce qui perche haut des oisillons

vers des ciels matures

                                         ***

les lambeaux

les filles du port

les frissons sur les peaux émerveillées …

du fond des morts et des mondes j’ai pris

ton cœur en mémoire

                                         ***

23 avril 2018

revenir à Syracuse sur des pensées de Nicolas de Cues

                                         ***

26 avril 2018

mon corps comme soleil dispersé

                                         ***

29 avril 2018

mes larmes sont de minuit

derrière la porte

de quelque ombre que tu portes

c’est le plomb des pluies de ma nuit

                                         ***

Chopin est de marbre blanc comme d’une certaine Sicile

en jets d’eau

les scherzis de fièvre sur les bouches belliniennes

vers des siècles qui donnent l’ocre décati de la pierre

emmurant le monde comme autant de jardins

où gisent les guépards

RELIEFS DE FAUTRIER

1 Mai 2018

la mer de plomb comme une aura

éclaircie de juillet…

                                         ***

3 Mai 2018

notre rire est plus haut que les toitures

comme la mer dans son débord ferait naufrage

c’est l’ange tueur de temps

l’Icare tombé que nous ramassons à bout de bras

                                       ***

4 Mai 2018

j’ai réarmé sur la pierre des vents de soleil

l’herbe debout

ma misère à la pointe des lèvres

et les vergers aux commissures des désirs

c’était un temps stellaire

comme spasme d’orchidée

avec sur les murs ton nom palimpsestueux

et aux lèvres le parfum des violettes

                                       ***

le ciel ordonné d’étoiles comme un chemin de navigation

perdu

la passion ayant jeté l’ancre

                                       ***

8 Mai 2018

tes mains sur mon cœur à faire tomber les tambours

« et quand j’ai cessé de le haïr

je cessais de l’aimer »

                              ***

15 Mai 2018

mes croyances en jachères au fond des rues

des bars et des espérances

ma nudité de plein ciel

comme Jean Babilée le pendu

mes larmes de toujours

le monologue des morts à gravir

les mains jointes le ciel hypothétique

                                       ***

dans les bars pour tromper les peurs à boire ensemble

digérer le train de la vie passante

et installer un temps parallèle

dans les bars à trouver les illusions et les désastres

le temps de mourir dans un hoquet pour la droiture du monde

les petites morts qui vont venir avec la nuit

et là c’est le vin rouge la lumière dans le ventre

dans les bars il y a les littératures qui viennent

les parchemineries de Fontaine de Vaucluse

avec et sans Pétrarque les amours qui perdent au jeu

et les crépuscules sur émeraude

il y a aussi les Chili et les Colombie entrechoquées de la clarté

des verres qui nous grandissent

dans les bars chaque jour chercher le soleil

trinquer de tâche rouge

dénoncer le monde et le réduire au notre

remodeler la lune sur les doubles croche des polyphonies

du énième verre et donner de l’espace

à celui qui vient à la rencontre

dans les bars on y a notre verbe qui monte haut à maintenir 

comme une concession de cimetière le rouge qui s’étoile

dans les bars les pluies tombent aussi sur le verdâtre des passions

et là c’est un vin rouge dans la lumière du ventre

est-ce le visage de l’Ulysse revenu et celui des voix bibliques ?

dans les bars on apprend à dire jadis ou naguère construisant

des futurs homériques et des navigations constellaires

avec le tokaï de Hongrie et les caravelles qui traversent

les espérance  -nous avions longtemps cru que dans les bars

il y avait comme d’amour et peu chère

l’idée d’une résidence secondaire

dans le vin rouge le sublime au ventre l’oubli venu

comme la femme qui nous laisse sur les margelles de nos attentes

l’argile qui nous a construit le rouge au ventre

comme étoiles de poussière

ce temps de zinc à se perdre dans des Saint Guy rondissimo

                                       ***

21 Mai 2018

comme d’un verre de Venise l’éclat

des décombres de la nuit

les Didons de l’orage et les infertiles je t’aime

les embouchures de Palerme dans le froissis des ruines

Hugo disant « le mur des siècles m’apparut »

                                       ***

22 Mai 2018

dans les enserres du cœur mon âme a dit adieu

les matins de goélands disparus

les balcons de la nuit frappant à la porte

                                       ***

23 Mai 2018

un divin dizain suffirait en jonglerie

pour dire tout l’ouest crépusculaire

de Montana en Arizona

de ces pays de chevaux de fer

sur les rails des prairies

ou dans les espaces clos des usines

de toutes les lois du plomb

dans les voyages du temps de mon enfance

côté chevauchées et cavaleries « … dans la famille Ford

je demande Henry

 je demande John »

                                       ***

28 Mai 2018

dans la roseraie de mon sang il y a ce promontoire

de mille oiseaux

où je prenais ta nudité à la gorge du temps

comme une crinière de désir noir

                                       ***

30 Mai 2018

l’immémorial azur sous l’amas des choses

la geste du temporel qui donnait la patine

à l’avenue nocturne sans fantôme et nul ange

ou tramway qui déposent la solitude dormante

d’une nuit d’ébène

je gardais sous la manche cet espèce de sanglot

du bout des baisers

qui te suivaient du plus loin des yeux clos

dans les étoiles il y eut comme un bal

3/8 juin 2018

monde affadi aux aiguilles brisées d’horloge

nous avions eu tant de rois

qu’ils nous étaient devenus familiers

de murailles et de cloches

que la terre a levé en une glaise charnue

de manteaux de saint Martin en éperon de Beauce

du Puy tendre aux crayons d’or d’Aveyron

de Conques au mourir de la nuit en chaos de Sinobre

j’étoilais mes pourpoints de vallées et de dentelles

de rus et de sauveterres 

nous avions eu tant d’âmes et d’architectures

de vies qui se gravaient dans les porosités du temps

le cœur s’enfuyant de ses amours en bas noir

surplombant des fond de l’abîme ce je qui est un autre

                                         ***

9 juin 2018

du plus loin des chagrins à creuser les seins de l’endormie

                                         ***

12 juin 2018

tu avais des anges dans les travées de la mort

l’âme insoumise dans les dentelles et les balcons

éblouissants

d’où ruisselaient nos nudités

à l’heure des goélands et de leur poignard

qui mesuraient l’aigu à la guirlande de nos tentations

                                         ***

15 juin 2018

…telles les tarentelles des tarentules

                                         ***

celui du Tarn auquel je retournerai j’aurai nue tête

ce chemin près du cœur

pour encore à tomber sur la nuit des villes

au plus profond des poches trouées

dans les grandes nages de l’hérédité

dans les herbes hautes et l’odeur des brebis

ces désirs fanés de ton corps

par les châteaux les désespoirs

le vin au ventre l’ivresse palatine

                                         ***

20 juin 2018

c’est la fin de la nuit demain recommencée

ce que j’invente de paradis diurnes

et de pêcheurs de pluies

les bourreaux et les équarrisseurs des échos

parlant de toi

de la partie de chasse dans le goût du large

des horizons de nature morte le cœur enclos

des blancheurs de désirs et des poignes

tambourinant des évangiles désarmés

                                         ***

est-ce que le monde respire dans les horizons bleus

des quatuors à cordes ?

est-ce que le monde tisse encore la polyphonie d’une aurore

sous les billots révolus à la hache des tes hanches ?

est-ce que le monde respire dans les corridors du temps

quand tu disais je porte la nuit ?

                                         ***

comme une Rochelle une ambre une muraille

une soif d’embarcadère

les voilures s’habillent des embruns

des seules solitudes  qui ne nous avaient désarmés

                                         ***

21/23 juin 2018

c’est la naissance de Cronos qui a permis la furie des étoiles

l’indigo des passions

cette arachnéenne volonté de l’expansion

la lyrique des Meistersinger la légende des siècles

et la complainte de Rutebeuf

c’était sous les chênes la naissance d’un monde revêtu

de la chair rose du couchant

et bien que ce fut une nuit de violette dans le bleu des douleurs

nous marchions seuls dans la ville

                                         ***

24 juin 2018

El Greco

comme de ces femmes qui impriment des amours arbitraires

frappant Jericho

des parfums de vie ascendante et des foudroiements de Pentecôte

l’acier de rossignol et des mappemondes de chagrin

les azurs mystiques que nous portions dans le cœur ouvert

les virginités à bout portant dans les litanies de la nuit

                                         ***

les yeux clos disions nous

                             le bleu de nos amours dans une cécité de nacre

la dernière lettre d’amour faisant comme une liane

reptilienne

dans les nœuds froids de l’au-delà des collines

                                         ***

je boirais dans les espaces nocturnes que tu touches

du doigt de tes douleurs

as-tu été chasseresse sur cette longue agonie

de mes tessons de funérailles ?

                                        

si tu savais loin de moi toutes ces îles perméables

dans nos yeux d’ancre

la corde de lin qui nous tenait du bout de ses rêves

                                         ***

27 juin 2018

pour les plus gueuses le baiser me vint d’un seul fruit des lèvres

les closeries écloses au grand jour accoudées

ma nuit partagée réminiscente

la romance possible

l’octuor et tous les vents grandissant

au ciel de fissures

de chambres closes

                                         ***

Fautrier semait des empreintes et des glaciations miniatures

des catacombes de sous œuvres

des traces christiques sur des sables retors

des bouteilles d’encre d’où nous écrivions le flanc des douleurs

les fantômes

les mosaïques éparses des visages de Dieu

                                         ***

30 juin 2018

ce que je savais d’un chant ganté et ancestral

montait des orfèvreries d’éveilleurs

les grandes crudités de la terre

les tubéreux coquelicots du temps qui nous fane

lorsque l’aurore nous apparut charnelle

                                         ***

Fautrier des plâtres et des glaises originelles

des otages du monde

des entrailles de l’âme

et du fil rouge qu’ils ont sur les ailes

de ces ventres de lumière d’août

et de toujours contrepointées naissances

révélant les calibres de l’avenir

                                         ***

j’ai d’une certitude de cran d’arrêt un désir déferlant

jusqu’au consumé des bleus de l’âme

d’une catharsis de la terre qui ne serait jamais hongre

5 juillet 2018

je t’avais traversée du regard comme un orage

s’en va dérivant

la gerçure de trop avoir épousé des rêves sauvages

de nos juillet hors les murs

de terres oublieuses

ma sœur pluvieuse de garrigues et d’aromates

je t’avais revue comme d’un coma dans la lumière blanche

                                         ***

les clefs du cœur

les cadenas nocturnes

les emmurements scélérats

jusqu’à cette aube de l’enfance

                                         ***

7 juillet 2018

ce baiser qu’on donne à la troisième malvoisie

qui te fait fondre

entre deux déluges et les griseries

dans le gris de la vie

le tensiomètre qui mesure

ce que le cœur a toujours fléché

cette usure de requiem qui porte à notre flanc

                                         ***

les moulins ont des ailes

qui s’étoilent dans le ciel

                                         ***

c’était sous ces toitures végétales les cariatides chuchotant

les degrés de mes vrais désirs en face de l’hôtel une étoile

mais sans un euro la foudre nous surprit

buissonniers dans l’ombre sous l’humus

et les déshabillés

dans la douceur des bambous

quand d’académiques forces de l’ordre

nous saisirent au sifflet

lorsque je passais ta culotte

sous fougère par dessus tête

                                         ***

14 juillet 2018

tes paupières avaient le velours d’un moyen âge oriental

jusqu’à nos traverses de ciel

et les bleus de la mort

dans le lit des étoiles la face cachée de nos amours

a toujours eu le pouvoir d’élever la nuit aux cicatrices

du temps tuilé dans des ivrogneries de ruelle

nous avions vécu des milliards de sommeil

sous tes paupières qui englobaient les mondes

et ces pulsations du jour où j’allais errant

                                         ***

la tour Eiffel se déshabille du plus haut de ses érections

comme aux milliards de milliards de sanglots

l’âme humaine respire de nos amours saltimbanques

                                         ***

15 juillet 2018

vendre le paradis fermer les paupières

                                         ***

17 juillet 2018

de passage à Anvers

de nuit était-ce crise

ces derniers cris en vers ?

de loup d’automne monotone

                                         ***

17 juillet 2018

la ravine dans les plus profonds soleils

à mourir lumineux en chemins d’exil

nous aurons l’inconsolable être de la mort

les affres matinales comme éblouissement

                                         ***

25 juillet 2018

dans la jacynthe des Pyrénées aux crapauds accoucheurs

la lune nous donnait ses marées

                                         ***

dans les mains de Londres je m’en allais vers des brises de Tamise

des banlieues de gazon et des entrailles de ville

comme un baiser sur le front de ton acier et le verre de tes opacités

                                         ***

26 juillet 2018

je descendais souvent vers les marges du soleil

vers les vents auriculaires

qui parlaient de ta peau

de tes ors

et de la carcération d’ombre

qui donnait sous mes semelles

cette trace odorante de nos évasions

                                         ***

comme un bouteiller de Louis XI la vigne regorgeante

dans les caisses de Montlouis

j’avais à rendre l’opulence de nos désordres de la nuit

et tout ce qui pâlit l’or des traverses où la terre existe

                                         ***

27 juillet 2018

nos neiges disparaissent des Pyrénées et des Alpes

le Kilimandjaro est comme radis noir de Silvacane

que reste-t-il des bonnets blancs de notre enfance ?

                                         ***

29 juillet 2018

j’ouvrirai ces volets clos de Palerme

ces lieux d’orage où dorment les sangs noirs

la mer inlassable à boire vingt fois le vin des désirs

je trouverai les nouvelles merveilles du monde

sous les suaires et les colonnes de porphyre

je baiserai la coagulation du temps

la cruauté des vagues comme paupières qui se ferment

                                         ***

et toi belle insomniaque

dans le château de tes prisons

les sommeils se soulevaient jusqu’au souvenir que nous étions mortels

                                         ***    

30 juillet 2018

je te montrerai mes suicides et l’étoile qui parle à l’oreille

ma peau qui se dévêt

comme serpent qui forge l’acier du sifflement

et du cul des bouteilles les lois du ciel

                                         ***

31 juillet 2018

les hasards font-ils oublier ce qui nous destine ?

1 août 2018

Malone meurt et nous aussi dans la chair même de la mort

la solitude et le verbe fossoyeur

avec le ciel mûri

et l’excavante nuit dans ses lézardes

                                                    ***

7/8 août 2018

dans cet univers qui est au cœur de mes sommeils

les ruelles du temps se paraient des couleurs de ta bouche

les moulins à vent égrenaient les étoiles des navigations

les vents pétrissaient la nuit jusqu’aux confins de nos amours

d’une nuit parallèle

d’une source éclose

et des abîmes sanguines à la caresse du jour

je t’aimais dans ces ruelles du temps avec tes lèvres trémulantes

oubliant ces néants qui étaient à venir

                                         ***

10 août 2018

que faites vous les morts dont la peau s’en va vers la terre… ?

des sillons qui creusent

de ce qui demeure des cargos des paquebots des terrains vagues

des sillages

                                  ***

10/11 août 2018

les nuits blêmes amarrées les accidents de ciel

descendirent pour que sur ton front

se dessinent les accents du sommeil

                                         ***

15 août 2018

je reste sur les fondations sexagénaires de nos odyssées

à dire que nous avons cru au bonheur

à larder l’horizon d’étoiles que nous ne connaîtrons pas

                                         ***

la vie est tempête polyphonique jusqu’à sa mort fuguée

                                         ***

la terre en était encore à l’état de promesse

loin des grimoires jaunis

qui parlent aujourd’hui des enfances qui ne sont plus

la terre parlait des semailles et des chants nocturnes

qui ne fermaient pas à clef

les saisons les désirs étaient dans la droiture de toute chair

l’herbe était haute

les constellations faisaient friser nos avenirs

                                         ***

je bois là l’ivresse d’un monde rendu fade

                                         ***

17 août 2018

la vacuité venant du plus bleu de l’âme

des couloirs de mort nous avaient pris par la main

                                         ***

19 août 2018

comme autant d’horizons ouverts sur les dunes des Pilat

et des beffrois

quand le ciel est bas les carillons sillonnent

à pleines poignées des nuits de porcelaine

et des oresties voyageuses

des cariatides porteuses de toutes les franges des étoiles

                                         ***

tu passais dans la pluie pour jouer de tes doigts

ce ciel des arcs qui cambre et porte sur le cœur

ces fonds de jaunisse à la ravine des orages

                                         ***

qu’est devenu Montaillou dans ses tablatures Cathares

ses maisons de chats

ses collines bleues de bergers ?

                                         ***

les larmes n’ont jamais défini le ciel de ses orages

                                         ***

Dieu nous a fendu le crâne d’une vie promise

                                         ***

au portuaire des jours il ne nous était promis

que de ruisselants avenirs

immémoriaux pourquoi nous faut-il mourir ?

                                         ***

dans les gouffres du temps nos bouches de stalagmites

se rejoindront-elles ?

                                         ***

19 août 2018

les rivières pures où manque l’oxygène deviennent

ces coronaires de la cervelle sur des berges au ressac

inextinguible de nos âmes

                                         ***

l’usure du temps est pour toi et moi

mais qu’est ce qui use le temps ?

notre chair qui s’en va pas à pas ?

                                         ***

au-delà de ce que nous énonçons dans le langage

s’insurge en creux un large fleuve de pensée

de désir

et une vieille sculpture de nous façonnée

par les générations de chair

                                         ***

l’amour a forci le ventre de mes vieux désirs

ce qu’aveuglément mes illusions mesuraient du plus épais

de la cruauté

et de la plus éperdue liasse d’amour

                                         ***

le langage n’est qu’une émulsion de la pensée dans toute sa gangue

                                         ***

c’est du palais de Cnossos que s’en vinrent des taureaux magnifiques

                                         ***

nous avons eu Schopenhauer en partage

les vagues de l’Atlantique

les brisants qui demeurent

la grande faisanderie qui nous est promise

                                         ***

l’angoisse commence à me prendre – je sais –

dussé-je reconduire l’usure de mes ivresses

                                         ***

23 août 2018

Novarina archéologue de Dieu

                                         ***

30 août 2018

je donnerai mon manteau de Saint Martin

à la merci des mages

des étoiles qui endiguent les fonds fauves

de mes nuits d’ivrogne

à entendre battre les tubulures de mon sommeil

                                         ***

le sommeil serait-il une particule fratricide de la mort ?

                                         ***

j’attends l’octobre qui nous mène à la lucidité de la pierre

à l’humilité sans dissonance

à la ruine de ces traverses de la mort cassante

                                         ***

le voudrais-je l’ensevelissement de la parole sur ses chants

extinguibles ne rendrait pas la vocifération meilleure

que dans son nid qui nous fait nous en aller

                                         ***

la pierre cassante comme une évidence de la mort haute

depuis le port de Bastia et ses pleins jeux d’orgue qui trémulent

                                         ***

combien de lassitudes nous mèneront vers des épousailles

de terrains vagues

jusqu’au fort de nos baisers dans les bergeries du vent

                                         ***

je t’aimais comme d’une banquise meurtrière

au plus gercé de nos baisers

                                         ***

les fantaisies à quatre mains

les Schubert à mordre les oreilles

sur des queues de cerises en fa

et encore en fa mineur

de ceux qui s’abritent au fond des foudres

                                        ***

certains soir Mars nous convie aux ratures du ciel

à l’angoisse qui disait je vous aimais

au delà de la mer

debout dans l’herbe à refondre l’hiver

jusqu’à la pilosité de Vénus

                                         ***

31 août 2018

je ne t’ai pas sauvée de la nuit

je t’ai enrichie de mes douleurs

                                         ***

prendre ma peine comme une mer qui dérive

CINQUANTE NUANCES DE NOIR

2 septembre 2018

dans la philosophie du vide il y a cette chance

des fleurs de cerisiers –

-le gravier aux nénuphars

-le sable apaisé et la pluie sur les joues

-la camomille du sommeil

                                        ***

3 septembre 2018

depuis la nuit c’est l’éclosion du jour qui caresse l’angoisse au ventre

                                        ***

Reprenons le fil : l’homme de raison s’est donc fâché avec Dieu…

                                        ***

n’écrire le verbe aimer qu’à l’imparfait

                                        ***

L’amour est un en jeu

                                        ***

6 septembre 2018

pour les îliens les marquisiennes loin et près

de St Léger Léger les vagues sont venues

ce sont maintenant le vent et ses éloges

dans la fluidité des nocturnes

les varechs au pied des promesses

les crocs qui déchirent les navires

avec les sables et les champs aux corbeaux

qui gardent les trèfles quadri lobés de nos éternités

                                        ***

comment concilier le minéral et la foudre  qui en a décliné

l’origine ?

justifier le temps sur les barges de l’éternité

comment nommer Dieu dans les ombilics de la matière

le nœud coulant qui nous tient du bout de ses néants ?

                                        ***

7 septembre 2018

« la mort m’incrimine » je ne sais comment me soustraire

au délit

à la jalousie de tes cercles de nudité

de tes tutelles de caïman

sans quoi l’eau des vivants s’en irait perdre ton visage

                                        ***

hors les murs le cœur sanglé « le chants des adolescents dans la fournaise »

avec les poings de la violence s’en fut dans la langue des anges

le bruissement immémorial revenant par le train de nuit

                                        ***

10 septembre 2018

j’ai encore trop d’enfance pour me départir du tableau noir du plein jour

du goût de la craie et de l’encre des yeux de mes amours

des pavés de Sumer et des sables de Persépolis

je tresse l’automne de mes poches perdues

des chevaux de bois et des baisers de lys

dans l’ancrage et les archimages des issues de la nuit

                                        ***

11 septembre 2018

l’innommable est proche

                                        ***

depuis les octobres de soixante huit au Parc Impérial

les arbres ont forci qu’ils semblent inventer l’ombre

sans effort

mes pas me mèneront-ils vers ces goûts de brûlé

de l’immolation ?

                                        ***

j’aime les Mars et les Octobres

la sagesse du monde

des plus pointues douceurs

                                        ***

entre un phare des côtes de Bretagne dans des nuits debout

et une vie de pêche à la mouche

qu’aurais-je choisi loin de mes racines ?

                                        ***

13 septembre 2018

Bon, Beckett nous mène vers la conscience du néant.

Il oublie l’après . Y en a –t-il ?

oui : j’attends

non : comment ?

(j’ai mal du côté d’une hanche, de l’arthrose près de la nuque

je dors mal. Je respire toutes les deux heures et je pisse.

la douleur existe. mais le néant aussi.

comment ?

comment prétend-il être cette dernière maille de la raison ?

comment vivre le néant qu’on est en train de me préparer ?

comme pour une anesthésie, sera-ce une bonne surprise de réveil ?

ce moment où on se dit que ce n’est rien qu’un fragment

de mauvais sommeil et qu’on n’a pas perdu les rails ?

ou d’une irréelle impossibilité de dimensionner la conscience

qui n’est que celle dont j’ai peur qu’elle ne fut que de ce théâtre

de carton dont je ne connais pas qu’elle put se donner une rivale

avec de multiples options à la mesure de ce que j’ignore.

–mais c’est bien la nuit qui continue- affreuse.)

                                        ***

les gutturales lames des cris effilés des goélands

me rappèlent le temps où les vents de nuit

pénétraient au plus miraculeux de nos amours

                                        ***

et quand je serai mort ce qui manquera

c’est la radieuse odyssée

du petit ange de ma fille

                                        ***

15 septembre 2018

le ciel soufflait sur les mâtures

les vendanges du vent

nous menaient

dans des âpretés occultes

où la mort est debout

                                        ***

comment connaître l’œuvre de la mort ?

                                        ***

les graviers de nos finitudes font un carillon de ciel

sur des Nord de lauriers roses

des poings de claviers sur les élévations de requiem

                                        ***

la mort infléchit déjà la terre qui se glace

le temps marque la pause des satiétés

où le cœur de la peur engendre nos statuaires de calcaire

                                        ***

de quelles âmes sans défaut ces portraits de châteaux

où ne coule plus qu’un sommeil inoculé

du pourpre de sangs anciens ?

                                        ***

j’aspirais à un visage de mélancolie

comme un poing vacillant de lune

l’errance et les portes qui se ferment

les sous neufs de la tendresse

                                        ***

17 septembre 2018

le cœur des métamorphoses ne pèse

que le poids du sommeil blanc

la ductilité de la prime mort

qui se rétracte comme déjà

une cécité de soleil chaque nuit

opère la fenaison du dormeur

c’est le cœur de l’absence

qui entrevoit de larmes la clarté

comme prescience chaque nuit

de la vraie nuit qui viendra

                                        ***

septembre de douceur

avec la mort de la mer morte

le sel que je te donne sur la bouche

                                        ***

j’ai vu un coquelicot dans les blés mûrs de juillet

comme un bouclier solitaire sur les épaules de la terre

                                        ***

18 septembre 2018

je ferai deuil de l’effeuillement de mes derniers sommeils

demain c’est la réglisse noire

sans phare

au nœud coulant de pluies neuves

     poissards d’un dernier autre âge

                                        ***

mourir mais dans un tiroir coulissant les velours de la mémoire

                                  ***

19 septembre 2018

dans les déserts où l’air est rare dans les angoisses de pleine poitrine

il n’est plus de sources pour les branchies de la soif

                                        ***

je suis sur les traces

pas à pas

d’un souffle rare

                                        ***

reste une poésie de dentelles aux appoggiatures

le temps d’un souffle

                                        ***

LONDON EYE

murs sur lesquels Shakespeare était à la claquemure

du soleil et du tuba d’un vieux souffleur

dans les faïences et les cyclones sous les paupières

de l’acier rouge des cheminements

le cœur battait disant je suis London la rouge et noire

au rythme du rose et de l’argenté

sous le pont indien de mes soupirs

                                        ***

26 septembre 2018

celle qui du fond du cœur sait l’horizon

du temps qui m’ensevelit

                                        ***

30 septembre 2018

comme une neige dans l’airain des fleurs

vivant de ce que la mort meurt

en dormant de notre vie pathétique

2 octobre 2018

pourquoi le ciel est bleu d’avoir creusé notre âme ?

                                        ***

je partirai d’une transhumance

d’un chagrin qui pose les aurores

avec quelque soupçon d’une herbe haute

                                        ***

je voudrais que ma poésie qui venait pour t’attendre

sous des draps de frisson

rendit mes nocturnes blêmes aux tuiles de la nuit

de celles jouxtant nos amours

dans des baraquements de solitude

                                        ***

j’ai une mort qui soupire d’avoir méconnu la neige qui tombe

la plus moucheté et l’écriture en balafre dans le miroir inoccupé

                                        ***

mon âme avait dispersé l’argile de mes origines

                                        ***

des gigues et des forlanes proches des pierres du fond des sommeils

à mourir dans l’ordure du temps

je vivais les pluies du monde

de paupières portuaires

de celles qui prennent la main de mes femmes de sable

                                        ***

c’était de ce ciel de bleu inextinguible

c’était comme une éternité qui reste

au coin des lèvres

                                        ***

nous aimions Varese nous aimions le bronze

des sons au large d’un blanc sommeil noir

qui tombe sur la ville

                                        ***

comment de toi à moi et de moi sans toi

vivrons nous à la fin des sables confondus ?

                                        ***

5 octobre 2018

mes os se sont creusés je reste avec cette lucidité de sel

dans les calanques au bord des lèvres de havre

de ces grands larges

qui mesurent l’étroitesse de mes porosités

                                        ***

la lumière mène vers la lucidité des montagnes

j’ai les syllabes de nos amours et toute la bouche

de nos baisers taris

par la main nous allions vers des déserts

comme à ces roses corrosives

de tout ton corps dans les couperets de l’obscurité

                                        ***

ce que j’aimais dans ce printemps de soixante huit

avec ses guerres factices

et ses médiocraties comme hérédité

c’est que mon père et ma mère étaient vivants

que les soufflés au fromage de la Nonina

de la rue des Potiers

étaient inatteignables

                                        ***

17 octobre 2018

 LOUIS L’ONCLE SOUL

De Venise je n’ai pas les labyrinthes et les eaux mortes

les Tintoret de plafonds et les Burano d’ocre

les Céline au pont de Londres

et les Virginie de quinze ans

je ne serai le mur d’amour des amants de Vérone

je ne gravirai pas les tours de Notre Dame

avec les vertiges de l’esprit dans mes poches

ni les Aconcagua dans la neige de mes amours

je ne serai Dante frappant aux portes de l’éternité

ni Shakespeare frappé d’épée et des fantômes

des forêts de Sherwood

je ne serai la nuit close des répons aux ténèbres

l’azur qui s’ouvre sur le miroir des lacs d’Autriche

je ne serai pas l’homme nu au « défilé de la hache »

de Salammbô

je ne serai pas l’angelure de mes mains sur ta peau

les Géorgiques de Virgile dans les cadenas de l’azur

je ne serai les Enéides et leur destin de glaive

ni le sommeil débourbé des mouches et la nausée dans la gorge

je ne serai pas l’homme ancien de mes amours anciennes

ni la conscience de ma mort au moment de l’être

ni Novarina déclinant Dieu dans des enclos

et dans des bleus de cobalt

je ne serai pas la sagesse de Montaigne

à la douleur néphrétique ni l’aquitain de Beychevelle

(baisse voile) de saint Julien à l’estuaire des Girondes

je ne serai encore que le Sisyphe possible des bistrots

et resterai l’enfant seul qui tenait la main de ma mère

                                        ***

21 octobre 2018

les songes laissent-ils les cicatrices du cœur

dans les jachères de nos printemps ?

                                        ***

des territoires d’oubli demeurent les craies de la mémoire

                                        ***

24 octobre 2018

DA VENEZIA

Redevenu Antonio Canal, Canaletto, le temps des sanguines de soleil

le moment âpre où le couchant rentre sur l’orient de l’occident

des Bucentaures de velours aux épousailles de la mer

que je reste sur les quais et l’ortie de tes eaux mortes

30 octobre 2018

combien sont revenus foudroyés

de Bayreuth d’Altamont

de la glotte et du glaive

de l’arbre et de ses poitrines vivantes

de l’amour à cru au suffrage du vent

ce qui tranche comme l’azur

d’un couteau sur le cœur ?

combien sont nues dans des rosées de chagrin

de soupirail et d’angelures

dans nos mains de trèfles les passions de fers

vénitiennes de palaces et de môles héréditaires ?

31 octobre 2018

depuis les môles du couchant la mort venait

avec des yeux de khôl

comme une Venise

dans la clarté exquise

ma mort de miroir déjà feinte

nous habitait d’une vie parallèle

4 novembre 2018

combien d’acier dans le poids de nos cœur ?

combien de rêves dans l’angoisse du sommeil ?

                             ***

5 novembre 2018

de dieu et de néant nous n’avons la conception

ces deux seules pierres posées hors du cœur

d’en delà la dolence de ma nuit

et de cet en delà de ma foi terrestre

que ma clarté ne crève à les voir comme ange

en lumière de chimère et château

je porturai d’attente en espérance

de dieu de néant n’avons navrant la mémoire

que de noirceur bile et jalousie le vouloir

pour pire de nous séparés que de dieu sans néant

à mordre conscience l’âme libérée

d’entre toi et moi toujours de chair et divinité

qu’en désirance jamais ne meure

                                        ***

6 novembre 2018

que serons nous aux sables et aux galets ?

à la poussière grandissante ?

                                        ***

solitaires aux yeux de large

                                        ***

9 novembre 2018

les humains chantent la voix du ciel perdu

                                        ***

12 novembre 2018

combien de polyphonies évanouies

sur la crête des vagues ?

                                        ***

comme d’un tel tableau de Gustave Moreau je sais le sang

dans le pli des toges

l’ombre du rouge sur la marbrure de la chair

de toi devenue sphynx

dans l’aigu que pose le questionnement

                                        ***

14 novembre 2018

je te garderai comme clocher de Montauban

de ses tuiles et de mes racines de Tarn

de ces Garonnes qui s’entrecrochent de ciels

et de pigeonniers à crier de toutes les vignes

qui me contrefortent

du feu et de l’enclume

de cet effilement de nuages qui dit le vent portant

de nos visages anciens

                                        ***

15 novembre 2018

l’errance que requiert le haut livre des cimes de la solitude

tresse dans l’air respirable les cloches de Tinctoris

et les ténèbres lumineuses du Tintoret

                                         ***

17 novembre 2018

les âmes fortes les âmes mortes c’était la mort dans l’âme

dans des jougs d’automne

l’effacement des roses

comme un qui se damne

dans la chaleur d’une femme

                                        ***

le futur ne venait pas que d’hier

                                        ***

21 novembre 2018

tes baisers étaient charpentés et mes vignes en amont

franchissaient les bonheurs arides de nos amours

à la plus sarclante faux des vents de l’hiver

                                        ***

mort rendue à la mer dans ses tréfonds

mort par torpeur

dans les récifs abyssaux

dans des abîmes de voracité

dans l’univers clos

                                        ***

23 novembre 2018

irons nous à nouveau à ces collinettes

aux poitrines pucelles ?

                                        ***

25 novembre 2018

dans la nuit je serais un adagio de Bach

plus profond que la désolation d’un lac

le libera me du vin et de la grappe des femmes

d’une terre de Sienne

ou une griserie vénitienne

restant dans l’arche la brûlure

de la vie tombée dans le sommeil

                                        ***

la cohorte des paroles comme le linceul et l’effeuillement

de la marguerite

à garder la source diamantaire

du secret rare de nos épousailles

                                        ***

27 novembre 2018

de toutes les poupées de mes colères

                                                      et de celles oubliées

je vieillis dans les pruderies de sentiments gigognes

                                        ***

les oiseaux de mes sommeils s’insurgent-ils

comme battement de cœur  dans ces angoisses

qui dénudent les rêves ?

                                        ***

28 novembre 2018

tu es encore ce murmure qui glisse au vent

ce baiser posé au mortier du cœur

                                        ***

29 novembre 2018

nous ne sommes pas des dieux ni même des archanges

nous n’avons qu’un seul jour transfiguré les sables

                                        ***

30 novembre 2018

rester à quai de douleur

de fleurs et de pleurs

de partir et de repentir

dans l’or crépusculaire

à l’âge de l’anxiété

2 décembre 2018

ça commence donc avec « l’origine du monde »

là d’où nous venons

-à hisser aux cimaises de tous les parlements du monde-

                                        ***

4 décembre 2018

 «- ma nuit m’inonde d’une errance à venir

                                                      à crier vers toi Titus

– dans un palais d’or mourir de t’ensevelir Bérénice  »

                                  ***

7 décembre 2018

à fendre les saisons le secret des noyers l’écorce des arbres

à fendre les amours comme les coques qui ne résistent plus

les courbes et les sveltesses

à fendre l’âme les mappemondes

à fendre Dieu

à fendre les atomes

et demain fendre tes cuirasses

et t’aimer comme après fendre une noix de Grenoble

                                        ***

9 décembre 2018

dans les grivèleries de l’amour j’aurais toujours eu

l’insolence de croire qu’elles ne fussent jamais

ni de marbre ni de sable

                                        ***

Giono parlait de choléra sur les toits de Cucuron

                                        ***

je vivrais encore de tant de tes dentelles

soupçonneuses de nos amours

                                        ***

l’aurore est si fragile qu’on y autorise certains strabismes

à l’angle de notre midi

                                        ***

14 décembre 2018

fasse que la haute sarabande ne fut vers la nuit qui tombe

ce visage du lilas dans l’ombre

de tempêtes nocturnes et d’embouchure wagnérienne à la voix

d’un bronze d’automne/ j’aurais aimé ces équinoxes de hanches

ténébreuses de ces moissonneuses de la mer où Venise prend

le crépuscule dans son crescendo d’incendie au buccin

et aux calèches de la nuit/ dans mes pluies j’ai réanimé mon corps

mort sur le quai des départs le désir des exils vers des vents de Prague

où je sais encore le froid du givre hanté/ le ténébrisme du Tintoret

dans ses dédales de foudre/ mon cœur s’en était allé la vie obéissant

aux clameurs du ventre/ au centrifuge de veines bleues et aux douleurs

de pourpre

et à celui qui dit « viendrez vous à l’azur sans sépulture ? »

pour ce feu et ce froid du pavé de la rue d’un glacier d’azur et d’infini/

fasse qu’arrive sans douleur la fin du temps et que paix s’ensuive

dans les allées droites

de l’angoisse aux hérédités de la clarté/ la bouche romaine des vérités

de Palatin comme colline de nuages à la Poussin/

je tenais la mort à vivre dans le souffle et l’airain de la chair

dans le globe entre les mains qui disait le lieu de tes tanières

le verbe qui s’effondre comme l’aurore qui vient dans l’entraille

de mes collines

                 mes collinettes/

gisant toujours vivant

                 ***

19 décembre 2018

Cyrano et Ulysse des péninsules

ratisseurs de lunes

et cœurs las d’ergastule

je m’en vais le cœur en bandoulière

m’oubliant à flanc de mémoire

où tout s’allège

d’adieux qui t’ont laissée de neige

                                        ***

20 décembre 2018

ce que le vent soufflait c’était le temps

des chuchotis sur les franges des collines

la rébellion qui lissait

cette avenue montante où nous nous espérions

                                        ***

21 décembre 2018

mes arabesques mes chaînes iront à ta rencontre

dans les volières du temps

                                        ***

23 décembre 2018

depuis les nuages Venise est une ammonite fossile

un canal cochléaire sur un plan de ville

                                        ***

25 décembre 2018

ma vie à cadenasser

vie de cyprès

de dents de douleur

dans des matins de cimetière

                                        ***

au delà du seuil la poésie s’obscurcit

                                        ***

27 décembre 2018

c’est la première neige l’oiseau bagué par dessus les mers

la promesse de franchir ce que chacun franchira

avec ces voix de l’ombre qui disent « que votre cœur ne tremble pas »

                                        ***

30 décembre 2018

nous n’aurons pas même l’usufruit

des espaces de notre âme

                                        ***